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La Défenseure des droits livre un vade-mecum pour les enquêtes internes en matière de discrimination et de harcèlement sexuel

La Défenseure des droits livre un vade-mecum pour les enquêtes internes en matière de discrimination et de harcèlement sexuel

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La Défenseure des droits, Claire Hédon, a publié le 6 février une décision-cadre sur le recueil des signalements et l’enquête interne en cas de discrimination (incluant le harcèlement sexuel qui constitue une discrimination fondée sur le sexe et donc entrant dans le champ d’intervention de la Défenseure des droits). Elle y rappelle l’importance de mettre en place une méthodologie très précise permettant de respecter les principes de confidentialité, d’impartialité, d’objectivité et de rigueur.

Mettre en place et faire connaitre les dispositifs d’écoute et de signalement

Le premier rouage indispensable de cette procédure est la mise en place d’un dispositif d’écoute et de recueil des signalements (comme l’impose l’accord national interprofessionnel du 26 mars 2010). Les salariés doivent pouvoir y accéder facilement que ce soit par email avec une adresse dédiée, par téléphone ou bien encore en permettant un accueil physique.

► Si le dispositif est externalisé ou mutualisé, les salariés ne doivent pas avoir à se déplacer dans une autre commune.

La plateforme de recueil des signalements doit être accessible à tous les salariés, qu’ils soient en CDI ou en CDD, qu’ils soient intérimaires ou stagiaires. Les personnes qui ont quitté l’entreprise et les candidats à une procédure de recrutement doivent également y avoir accès.

Le salarié – victime ou témoin – conserve bien sûr la possibilité de signaler les faits litigieux directement à son responsable hiérarchique, au RRH, au référent compétent en la matière, aux représentants du personnel ou au médecin du travail. 

L’employeur doit veiller à ce que les salariés soient dûment informés de l’existence de ces dispositifs et ce, de manière régulière : lettre d’information interne, site internet, information avec les bulletins de paie, présentation lors de réunions etc.

Il est recommandé de demander à la personne qui dépose un signalement de le faire par écrit – à des fins probatoires – mais également dans l’intérêt de l’enquête interne. La victime pourra ainsi y mentionner la chronologie des faits, les témoins potentiels, les attestations recueillies, les comptes rendus de réunions etc. Tout cela tout en veillant à bien garantir la stricte confidentialité des informations données.

 

La cellule d’écoute, un cadre de confiance
Il convient de bien distinguer le dispositif de signalement de la cellule d’écoute. De par son objet, cette dernière doit « constituer un cadre de confiance qui n’engage pas la victime ou le témoin à poursuivre son signalement et doit lui permettre d’obtenir une première information juridique ». Cette cellule d’écoute a aussi un rôle d’information et d’orientation.

 

► Il est indispensable de veiller à l’absence de lien direct ou indirect, présent ou passé, entre les personnes concernées par les faits signalés et les membres de la cellule d’écoute ou du dispositif de recueil du signalement.

Comment mener l’enquête interne

La Défenseure des droits accorde une importance toute particulière à l’enquête interne et de bien la mener dans les règles de l’art, sous peine de générer des risques. « Une enquête défaillante, notamment sans mesures de protection conservatoires, peut entrainer une dégradation ou une aggravation de l’état de santé [de la victime présumée], la contraindre à travailler avec celui ou celle qu’elle met en cause voire entrainer la suspension ou la rupture de son contrat de travail ». Le risque est également qu’une enquête bâclée entraine une reproduction des faits. L’employeur s’expose quant à lui à une dégradation du climat social et à la survenance de risques psychosociaux. 

La Défenseure des droits ne préconise pas l’ouverture systématique d’une enquête. Elle n’apparait indispensable que « si le signalement nécessite des investigations complémentaires ». Toutefois rares sont les situations de discrimination ou de harcèlement sexuel qui ne nécessitent pas une enquête, reconnait-elle, car les faits sont souvent complexes : versions contradictoires, situations à huis clos, crainte de mesures de représailles etc.

Déclenchement de l’enquête

L’employeur doit faire preuve de célérité et ouvrir l’enquête dans un délai bref après le signalement des faits. La Défenseure des droits recommande un « délai raisonnable après signalement de deux mois ». Si une enquête pénale ou civile est ouverte, l’employeur ne peut pas en attendre les résultats avant d’entamer sa propre enquête interne. Tout comme un classement sans suite ou une relaxe n’exonère pas forcément l’employeur de mener une enquête. Il convient de bien distinguer faute professionnelle et infraction pénale.

► Attention ! La tardiveté du signalement par rapport aux faits dénoncés ne permet pas à l’employeur de renoncer à toute enquête interne.

Le fait que le salarié soit en arrêt maladie ou ait quitté l’entreprise ne permet pas non plus à l’employeur de se dispenser de réaliser une enquête.

Il est recommandé à l’employeur de fixer précisément – en amont – la méthodologie de l’enquête interne en la formalisant dans une décision prise après information des IRP.

La Défenseure des droits considère que l’ensemble des personnes concernées doivent être informées de l’ouverture d’une enquête : la victime présumée et la personne mise en cause « sauf s’il existe un risque de pression de la part du mis en cause sur les victimes présumées et/ou témoins ».

Obligation de confidentialité 

Qu’il s’agisse de l’employeur ou des enquêteurs, ces derniers doivent faire preuve de discrétion lors du déroulement de l’enquête, notamment sur tous les éléments qui relèvent de la vie privée des personnes concernées.

► Attention toutefois, certains faits commis hors des temps et lieux de travail peuvent se rattacher à la vie professionnelle et donner lieu à une enquête interne.

La confidentialité suppose d’ailleurs de choisir le bon cadre : pas de lieu public, ni d’open space ou de salles de réunions vitrées. La confidentialité suppose également de respecter l’anonymat des personnes auditionnées. L’employeur doit toutefois conserver une version du dossier non anonymisée en cas de contentieux ultérieur. 

Choix de l’enquêteur 

L’une des questions cruciales est de savoir qui va mener l’enquête : le service en charge des RH ? De l’éthique ? Ou faut-il l’externaliser à un avocat, un cabinet de juristes ou de psychologues ?

La Défenseure des droits recommande a minima que l’enquête soit menée par au moins deux personnes afin de garantir l’objectivité et l’impartialité. Mais également de privilégier le recours à une personne extérieure au service dans lequel se sont déroulés les faits afin que ce dernier puisse faire preuve de distance et de neutralité. En revanche, si la direction ou des personnes du service habituellement chargé d’enquêter sont elles-mêmes mises en cause par un signalement, l’enquête devrait être confiée à un prestataire extérieur.

► A noter : si l’employeur décide d’impliquer les représentants du personnel, ces derniers doivent pouvoir participer aux choix méthodologiques à tous les stades de l’enquête.

Il est en tous les cas indispensable que les enquêteurs disposent de compétences juridiques et notamment aient suivi une formation actualisée sur les discriminations au travail et le harcèlement sexuel.

Quel que soit le choix fait, l’employeur doit veiller à n’exercer aucune pression sur les enquêteurs. 

Auditions 

La liste des personnes auditionnées est également un élément sensible de l’enquête.

Doivent être auditionnés : 

  • la victime présumée ;
  • la personne mise en cause ; 
  • les témoins pertinents y compris les témoins indirects ; 
  • les responsables hiérarchiques directs. 

Et, si leur audition est utile : 

  • le médecin du travail ; 
  • d’anciens collègues ; 
  • les représentants du personnel ; 
  • l’inspection du travail. 

► Attention ! La confrontation entre les salariés concernés est à proscrire compte tenu des risques psychosociaux !

Objectif : recueillir des éléments de présomption et rédiger le rapport

La procédure d’enquête vise à vérifier s’il existe un faisceau d’indices convergents laissant supposer l’existence d’une discrimination ou d’un harcèlement sexuel. 

Attention : la victime présumée n’a pas à apporter de preuves. C’est à la personne mise en cause de renverser la présomption ainsi établie.

A cet effet, chaque étape de l’enquête doit être retranscrite par écrit. La Défenseure des droits recommande notamment une retranscription écrites des auditions ,des comptes rendus qui doivent être relus et signés par la personne auditionnée.

Les enregistrements clandestins ne doivent pas être écartés ; ils peuvent désormais être pris en compte sous certaines conditions posées par l’Assemblée plénière de la Cour de cassation le 22 décembre 2023.

L’ensemble des éléments recueillis doivent figurer dans le rapport ainsi que les faits allégués, leur signalement, les mesures de protection mises en place, les difficultés rencontrées,…

Ce rapport peut être transmis : 

  • à la hiérarchie si des mesures doivent être mises en oeuvre ; 
  • aux représentants du personnel chargés des questions de santé et de sécurité ; 
  • à la victime présumée (tout du moins une synthèse). 

S’agissant des témoins, ils doivent être informés de la fin de la procédure. 

Reste la dernière étape – et non des moindres – celle visant à qualifier les faits. Il revient à l’employeur de le faire et non à l’enquêteur. La Défenseure des droits recommande « une appréciation objective, neutre et loyale de l’ensemble des éléments portés à leur connaissance lors de lors de l’enquête interne et d’en tirer les conséquences sur la qualification des faits ».

Mettre immédiatement en place des mesures de protection

Enquêter est une chose, protéger la santé de la victime pendant la période d’enquête en est une autre.

D’une part, l’employeur doit réagir dès le premier signalement de la victime présumée ou d’un témoin.

D’autre part, l »employeur qui a une obligation de sécurité à l’égard de ses salariés doit prendre les mesures nécessaires afin d’éviter une dégradation de l’état de santé du ou de la salariée concernée, en lien avec la médecine du travail, comme par exemple l’aménagement du poste ou sur les mesures à mettre en place au retour du salarié si ce dernier est en arrêt de travail.

Il convient également d’éloigner la personne mise en cause. L’employeur doit permettre à la victime présumée de ne pas côtoyer la ou les personnes qu’elle a mise(s) en cause dès le stade de l’enquête. Si des changements doivent être apportés aux conditions de travail, ils doivent affecter la personne mise en cause plutôt que la victime présumée. Une mise à pied conservatoire un placement en télétravail peuvent ainsi être envisagés.

Enfin, il convient de rappeler le plus tôt possible à la victime présumée et aux témoins par écrit l’interdiction de mesures de représailles.

Prendre une sanction rapidement le cas échéant

La sanction en droit du travail doit intervenir dans un délai de deux mois. Toutefois, en cas d’enquête, « le point de départ du délai de deux mois est alors reporté au jour de la remise à l’employeur du rapport d’enquête ». L’enquête ne doit pas non plus s’éterniser ; la Défenseure des droits préconise de conclure l’enquête dans des délais les plus brefs possibles.

► La Défenseure des droits recommande de ne pas entamer la procédure disciplinaire avant la fin de l’enquête interne.

La sanction doit être effective, proportionnée et dissuasive et la victime doit en être informée.

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Florence Mehrez
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Dans une décision-cadre du 6 février 2025, la Défenseure des droits, Claire Hédon, livre une méthodologie détaillée pour mener une enquête interne lorsque des faits de discrimination ou de harcèlement sexuel sont portés à la connaissance de la direction de l’entreprise.
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Discriminations : panorama de la jurisprudence des 12 derniers mois

Discriminations : panorama de la jurisprudence des 12 derniers mois

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Lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination (articles L.1132-1 et L.1134-1 du code du travail).

Illustrations de situations laissant ou non présumer l’existence d’une discrimination 

Discrimination en raison de l’état de santé

Une salariée qui était enceinte lorsqu’elle a été engagée, et en avait avisé l’employeur a été en arrêt de travail à deux reprises à la suite de deux fausses couches. Au lendemain de sa visite de reprise, elle est convoquée à un entretien préalable pour un licenciement, puis est licenciée pour insuffisante professionnelle. Elle n’avait jamais fait l’objet de recadrage, sa période d’essai avait été validée sans réserve et elle avait perçu une prime exceptionnelle de 2 500 euros. Le licenciement est discriminatoire (arrêt du 29 mai 2024). 

Discrimination en raison du sexe ou de la situation de famille

Deux arrêts intéressants en la matière, dont celle du Défenseur des droits :

  • une salariée reprenant son activité à l’issue de son congé de maternité ou congé parental n’a pas bénéficié d’une proposition d’entretien professionnel prévu par l’article L.6315-1 du code du travail, percevait un bonus au montant systématiquement inférieur à celui perçu par ses collègues masculins et n’en a perçu aucun à compter du retour de son congé maternité. La salariée est fondée à demander des dommages-intérêts pour préjudice économique du fait de la discrimination (arrêt du 27 nov. 2024) ; 
  • le refus de l’employeur de rompre de manière anticipée le congé parental d’une salariée au profit d’un congé maternité constitue une discrimination en raison de son sexe (décision du Défenseur des droits du 4 avril 2024).

Discrimination à l’identité de genre

Une salariée change d’identité de genre. Ses supérieurs hiérarchiques lui interdisent l’utilisation de son nouveau prénom, lui font des remarques sur sa transition, et lui donnent des consignes sur son maquillage sans que cela ne soit lié à des considérations professionnelles. Il s’agit d’une situation discriminatoire (conseil de prud’hommes d’Angers, 24 juin 2024).

Discrimination syndicale

Quatre arrêts en la matière :

  • un salarié est licencié peu de temps après avoir assisté un collègue à l’entretien préalable de son licenciement. Cet élément est suffisant pour considérer le licenciement comme discriminatoire (arrêt du  29 mai 2024) ; 
  • un salarié, délégué syndical, n’avait connu aucune évolution de carrière depuis 1998, n’était pas positionné sur la médiane des autres salariés engagés en même temps que lui et n’avait vu retenir aucune de ses candidatures à d’autres emplois proposés dans l’entreprise. La stagnation dans sa carrière professionnelle traduit une discrimination syndicale à son encontre ouvrant droit à réparation d’un préjudice salarial lié à cette discrimination (arrêt du 2 octobre 2024) ; 
  • un salarié, membre d’une institution représentative du personnel, est le seul membre de cette IRP à ne pas avoir reçu les programmes de formation, alors que tous les autres représentants du personnel les ont reçus. Ce fait est suffisant pour laisser présumer une discrimination syndicale à l’égard du salarié ouvrant droit à des dommages-intérêts (arrêt du 11 décembre 2024) ;
  • un délit d’entrave a été caractérisé par un employeur pour ne pas avoir mis à disposition un local pour un CSE (à l’époque des faits, délégation unique du personnel) et avoir ouvert des courriers confidentiels destinés à ce CSE. Cela n’est pas suffisant pour laisser présumer une discrimination à l’égard d’un salarié, membre du CSE (arrêt du 11 décembre 2024).
Illustrations jurisprudentielles sur les justifications légitimes à des mesures discriminatoires

Discrimination en raison de l’âge

Sont considérées comme des justifications objectives étrangères à toute discrimination :

  • la mesure liée à l’âge justifiée par un objectif légitime de préservation de la santé et de la sécurité des travailleurs et proportionnée : la mise à la retraite anticipée à 60 ans d’un salarié, ingénieur des mines en invalidité, est justifiée par l’environnement de travail des ingénieurs des mines qui travaillent à proximité des sites d’exploitation, les expose à des sources de pollution, soit des poussières, fumées et résidus de mines, induisant un risque accru de voir leur espérance de vie réduite (but légitime) étant entendu, en outre que la pension de retraite qui a remplacé la prime d’invalidité n’a pas modifié les revenus du salarié intéressé (pas d’atteinte disproportionnée aux droits du salarié) (arrêt du 6 mars 2024) ;
  • l’inégalité liée à l’âge justifiée par l’objectif de favoriser le partage du travail entre les générations : la disposition d’une convention collective qui prévoit une minoration du montant de l’indemnité de licenciement à compter de l’âge de 61 ans, justifiée par un objectif d’incitation au départ des salariés ayant atteint l’âge de la retraite pour favoriser le partage du travail entre les générations et l’insertion des jeunes travailleurs (but légitime), étant entendu que les travailleurs, malgré leur âge, bénéficient d’une couverture économique qui n’est pas déraisonnable au regard de la finalité recherché (pas d’atteinte disproportionnée) (arrêt du 8 janvier 2025).

Discrimination en raison du sexe et de la situation de famille

Une salariée rapportait des éléments de fait laissant supposer une discrimination en raison du sexe et de sa situation familiale liée à son congé maternité. L’employeur ne pouvait pas justifier ses actes, pour écarter toute discrimination, par la durée de l’absence (arrêt du 27 novembre 2024).

Discrimination syndicale

Face à une demande d’indemnisation pour discrimination syndicale d’un salarié, l’employeur établit que le salarié, représentant du personnel, malgré une moindre rémunération variable sur trois ans, a perçu la rémunération globale la plus élevée des salariés de sa catégorie au sein de la société. Il relève que le salarié a régulièrement pris la parole lors des réunions des instances paritaires, de sorte qu’il n’a pas subi d’entrave à l’exercice de ses mandats, qu’il a été indemnisé de ses frais de déplacement au-delà de ce qui est versé aux salariés et qu’il était destinataire des échanges au sein de l’entreprise. Est-ce des éléments suffisamment objectifs étrangers à toute discrimination ? Non répond la Cour de cassation (arrêt du 22 mai 2024).

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Claudiane Jaffre
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Nous vous présentons une sélection d’arrêts rendus par la Cour de cassation ces 12 derniers mois sur les éléments de faits susceptibles de laisser présumer l’existence d’une discrimination ainsi que sur les justifications objectives que peut présenter l’employeur.
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Fumer le narguilé pendant une croisière organisée par l’entreprise ne justifie pas un licenciement

Fumer le narguilé pendant une croisière organisée par l’entreprise ne justifie pas un licenciement

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Une vendeuse participe à une croisière en Floride organisée par la société de téléphonie qui l’emploi, du 26 au 31 mars 2015, et ce afin de récompenser les salariés lauréats d’un concours interne à l’entreprise. A la suite d’un incident survenu lors de cette croisière, elle est rapatriée le 30 mars 2015 et licenciée le 29 avril suivant. Son employeur lui reproche d’avoir, au mépris des règles de sécurité applicables à bord du bateau, fumé le narguilé dans sa cabine, en présence d’une autre salariée de l’entreprise enceinte, et obstrué le détecteur de fumée.

L’employeur condamné pour licenciement injustifié

Dans un premier temps, la cour d’appel condamne l’employeur pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employeur conteste cette décision soulignant qu’un fait commis hors du temps et du lieu de travail peut justifier un licenciement s’il se rattache à la vie professionnelle du salarié, ce qui est le cas en cas de manquement aux règles de sécurité commis à l’égard notamment de collègues à l’occasion d’un séjour organisé par l’employeur dans le but de récompenser les salariés lauréats d’un concours interne à l’entreprise. 

L’employeur invoquait également un trouble caractérisé au sein de l’entreprise en raison notamment des fonctions de la salariée, cette dernière ayant violé les principes de préséance et de savoir-être s’imposant à elle au regard de la nature de ses fonctions de vendeuse, et à l’atteinte portée à l’image de l’entreprise.

Pas de trouble objectif à l’entreprise, ni de violation du contrat de travail

La Cour de cassation confirme la décision des juges du fond et rejette les arguments invoqués par l’employeur.

Elle rappelle qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier, en principe, un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. Qu’ensuite, un trouble objectif dans le fonctionnement de l’entreprise résultant d’un fait tiré de la vie personnelle d’un salarié ne permet pas en lui-même de prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre de celui par lequel il est survenu.

Dans cette affaire, « s’agissant d’un voyage touristique quoique payé par l’entreprise à titre de récompense, la salariée ne se trouvait pas au temps du travail lorsqu’elle a commis les agissements dont elle ne conteste d’ailleurs pas la réalité et ne se trouvait donc soumise à aucun lien de subordination et n’était même pas soumise aux règles en vigueur au sein de l’entreprise, puisque les faits s’étaient déroulés en dehors du lieu de travail ». 

Par ailleurs, « la société ne démontrait pas un trouble caractérisé causé à l’entreprise, dont le fonctionnement était peu influencé par l’opinion des membres de l’équipage qui avaient pu être informés de l’incident, ni par les commentaires qu’avaient pu en faire les passagers et qu’aucune explication n’était donnée sur les éventuels effets de l’usage du narguilé sur la santé de la personne qui partageait la cabine de la salariée, ni même sur une éventuelle opposition de celle-ci à un tel usage ».

Les faits reprochés à la salariée relevaient bien de sa vie personnelle et ne pouvaient constituer un manquement aux obligations découlant de son contrat de travail. Le licenciement était donc bien injustifié. 

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Florence Mehrez
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Dans un arrêt du 22 janvier 2025, la Cour de cassation estime injustifié le licenciement d’une salariée qui avait fumé du narguilé dans sa cabine en présence d’une autre salariée enceinte au cours d’une croisière organisée par l’entreprise. Cela relevait de la vie privée de la salariée et n’avait créé aucun trouble objectif au sein de l’entreprise.
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Le Boss met à jour son contenu relatif à la prime de partage de la valeur

Le Boss met à jour son contenu relatif à la prime de partage de la valeur

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Issue de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat, la prime de partage de la valeur (PPV) a fait l’objet d’une instruction mise en ligne sur le site internet du Bulletin officiel de la sécurité sociale (Boss) le 10 octobre 2022, dans le bloc « Mesures exceptionnelles ». Mis à jour plusieurs fois depuis cette date, le contenu de cette instruction vient d’être transféré, le 24 janvier dernier, au sein d’une nouvelle rubrique du Boss intitulée « Epargne salariale », qui pour l’instant ne contient qu’un premier chapitre consacré à la PPV.

Ce transfert a nécessité une réécriture car le contenu, auparavant présenté sous la forme d’un « Questions-réponses », est désormais composé de paragraphes classiques au sein d’un plan. A cette occasion, quelques commentaires et exemples ont été introduits ou mis à jour.

Par ailleurs, de nouveaux paragraphes ont été ajoutés à propos de la possibilité d’affectation de la PPV à un plan d’épargne salariale, permise depuis le 1er juillet 2024 (loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023, article 9 ; décret n° 2024-644 du 29 juin 2024). Nous n’analyserons ci-après que ces ajouts. 

► Le Boss indique que le contenu du chapitre PPV est opposable à l’administration depuis le 1er février 2025. L’instruction du 10 octobre 2022 est abrogée mais est toujours accessible dans le bloc « Mesures exceptionnelles » et reste opposable pour le régime social temporaire des PPV avant le 1er janvier 2024, qui n’a pas été repris dans le nouveau chapitre.

Affectation de la PPV sur un plan d’épargne salariale : types de plans concernés

Les différents plans d’épargne auxquels peut être affectée la PPV sont le PEE, le Perco, le PERECO et le PERO. Ces plans peuvent être conclus au niveau de l’entreprise, de l’UES, du groupe, de la branche ou au niveau inter-entreprises (Boss-Epargne sal.-310).

► Pour rappel, en cas de placement sur un de ces plans, la PPV bénéficie d’une exonération d’impôt sur le revenu (loi n° 2022-1158, article 1er, VI ter).

Affectation de la PPV sur un plan d’épargne salariale : modification des règlements

Même si le code du travail ne le prévoit pas explicitement, le règlement du plan doit préciser clairement les différentes sources d’alimentation du plan d’épargne (Guide de l’épargne salariale, juillet 2014, dossier PEE, fiche 2).

En conséquence, les entreprises doivent modifier le règlement de leur plan d’épargne pour prévoir la possibilité d’y affecter les sommes versées au  titre de la PPV. Par tolérance, le Boss admet que les sommes versées jusqu’au 30 juin 2025 au titre de la PPV puissent être affectées à un plan avant la modification de son règlement (Boss-Epargne sal.-330).

De même, le règlement du plan doit être modifié pour que la PPV puisse faire l’objet d’un abondement de l’employeur. Sur ce point, pas de tolérance : pour l’administration, il est indispensable que les règlements des plans mentionnent si les sommes versées au titre de la PPV peuvent être abondées et à quelle hauteur, et aucun abondement n’est possible sans une modification du règlement (Boss-Epargne sal.-340).

Attention, les modifications visant à ajouter de nouvelles possibilités d’investissement des sommes au sein d’un plan d’épargne inter-entreprises peuvent, en principe, d’une révision simplifiée du règlement. Le Boss précise que cette procédure de révision simplifiée n’est pas application à la modification permettant l’affectation de la PPV au plan (Boss-Epargne sal.-350).

Affectation de la PPV sur un plan d’épargne salariale : information et recueil du choix des salariés

L’information des salariés via une fiche distinction du bulletin de paie

Si l’entreprise dispose d’un plan d’épargne salariale ou retraite visé ci-avant, chaque somme versée au titre de la PPV fait l’objet d’une fiche distincte du bulletin de paie qui mentionne notamment le montant attribué et la possibilité de verser tout ou partie de la prime sur le plan, ainsi que le délai de demande qui est de 15 jours à partir de la réception de ladite fiche (loi n° 2022-1158, article 1er VI ter ; décret n° 2024-644 du 29 juin 2024, article 1er).

Le Boss rappelle cette obligation informative (Boss-Epargne sal.-790).

► Selon les textes, la fiche distincte du bulletin de paie est délivrée aux salariés dès lors que l’entreprise dispose d’un plan d’épargne salariale. La question de sa délivrance se pose lorsqu’un plan existe mais ne vise pas la PPV comme source éventuelle d’alimentation. En toute logique, l’obligation ne devrait pas s’appliquer car elle est sans objet. Les mentions de la fiche autres que celles relatives à la possibilité d’affectation au plan (à savoir le montant de la PPV et les retenues au titre de la CSG/CRDS) figurent sur le bulletin de paie.

Un bulletin d’option pour recueillir le choix du salarié

Le Boss indique, par ailleurs, que les salariés sont interrogés sur l’emploi des sommes issues de la PPV par l’intermédiaire d’un bulletin d’option et que les salariés disposent de 15 jours après la réception de ce bulletin d’option pour décider de percevoir directement la prime ou d’en investir tout ou partie sur le plan (Boss-Epargne sal.-360).

Attention ! Les textes légaux et réglementaires faisant courir ce délai à partir du jour de réception par le salarié de la fiche distincte du bulletin de paie, il semble plus que judicieux, pour éviter toute discordance des délais, d’adresser au salarié fiche d’information et bulletin d’option en même temps.

L’administration précise que le délai de 15 jours se décompte en jours calendaires : il commence à courir le lendemain de la réception du bulletin (et de la fiche) et expire le dernier jour à minuit. Si le jour d’expiration est un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, le délai est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (Boss-Epargne sal.-360).

Comment informer et recueillir le choix du salarié si la prime est versée en plusieurs fois ?

Une PPV peut être versée en plusieurs fois, dans la limite d’un versement par trimestre au cours d’une année civile (loi n° 2022-1158, article 1er IV).

Dans cette situation, l’information des salariés sur l’investissement ou la disponibilité immédiate de la prime doit, en principe, être adressée au titre de chaque versement, indique le Boss.

Toutefois, il admet que l’employeur interroge les salariés seulement une fois, lors du premier versement, et qu’il considère la réponse du salarié valable pour ce versement et tous les suivants. Le salarié doit toutefois pouvoir revenir sur son choix initial, à chaque nouveau versement dans l’année civile. L’employeur doit l’informer de cette possibilité, lors de l’interrogation effectuée au moment du premier versement (Boss-Epargne sal.-390).

Attention ! Il ne faut pas confondre versement fractionné d’une PPV et versement de deux PPV au cours d’une même année civile. Dans le second cas de figure, la réponse donnée par le salarié lors du versement de la première PPV n’est pas valable lors du versement de la seconde.

Cas particulier des intérimaires

Les salariés intérimaires peuvent percevoir une PPV versée par leur employeur (l’entreprise de travail temporaire – ETT) mais aussi par l’entreprise utilisatrice dans laquelle ils sont mis à disposition, s’ils remplissent la condition de présence. Dans les deux cas, c’est l’ETT qui se charge du versement de la prime au salarié (loi n° 2022-1158, article 1er II ; Boss-Epargne sal.-500 et 510).

Le Boss précise, aujourd’hui, qu’il est tenu compte de l’effectif de l’entreprise utilisatrice pour l’application du régime social et fiscal de la PPV versée aux intérimaires.

Exemple : si un intérimaire percevant une rémunération inférieure à 3 Smic annuels se voit attribuer, en 2024, une PPV d’une entreprise utilisatrice, sa PPV est exonérée d’impôt sur le revenu, de CSG/CRDS seulement si cette entreprise emploie moins de 50 salariés. Peu importe l’effectif de l’ETT.

Le Boss précise également que les salariés intérimaires ne peuvent affecter leur prime qu’aux plans d’épargne de l’ETT, s’il en existe, et non aux plans d’épargne des entreprises utilisatrices (Boss-Epargne sal.-540).

Cette précision, qui semble logique puisqu’un intérimaire, n’étant pas lié à l’entreprise utilisatrice par un contrat de travail, n’a pas accès ses plans d’épargnes, appelle toutefois à la vigilance. Elle suppose que le règlement du plan de l’ETT vise cette source d’alimentation et prévoie, éventuellement, son abondement.

► A priori, l’exonération d’impôt sur le revenu s’appliquerait bien à ce cas particulier d’affectation puisque le VI ter de l’article 1er de la loi n° 2022-1158 qui prévoit cette exonération, vise les primes versées dans les conditions prévues au II à IV, ce qui englobe le cas des intérimaires (traité au II).

Comme auparavant, le Boss admet que la prime puisse être versée de manière décalée par l’ETT par rapport à l’entreprise utilisatrice (Boss-Epargne sal.-510).

► Dans l’instruction abrogée, il était indiqué, pour les primes bénéficiant du régime d’exonération en principe applicable jusqu’au 31 décembre 2023, que le versement pouvait avoir lieu après cette date mais avant une date butoir fixée au 29 février 2024 (Boss-Prime de partage de la valeur-2.12 et 7.5). Cette tolérance n’a pas été reprise et aucune date butoir n’a été fixée pour le régime d’exonération prenant fin le 31 décembre 2026.

Pas d’affectation par défaut ni de rétractation possible

A défaut de réponse du salarié dans le délai imparti, la prime lui est versée directement ; elle n’est pas affectée par défaut sur un plan.

En outre, dès lors que la prime est affectée sur un plan d’épargne salariale, le salarié ne peut pas revenir sur son choix et se rétracter. La prime ne peut pas être sortie du plan pendant la période d’indisponibilité prévue par le plan, sauf cas de déblocage anticipé. Seuls les avoirs en compte dans le plan d’épargne salariale avant la survenance du fait générateur ouvrant droit au déblocage anticipé peuvent être débloqués (Boss-Epargne sal.-390).

Nature de la prime affectée à un plan : un versement volontaire mais pas dans tous les plans

Le Boss précise que la PPV a la nature d’un versement volontaire (Boss-Epargne sal.-390) et qu’elle est prise en compte dans l’appréciation du plafond annuel des versements volontaires du salarié sur un PEE ou un Perco, égal à 25 % de la rémunération brute annuelle (Boss-Epargne sal.-400).

Pour rappel, l’administration considère en revanche que ne sont pas prises en compte, pour l’appréciation de ce plafond, les primes de participation ou d’intéressement verses au plan. Initialement ces deux types de versements étaient considérés comme étant volontaires mais la doctrine administrative a changé lors de la mise en place, pour chacun d’entre eux, de mécanismes d’affectation par défaut à un plan. Il est logique que la PPV, qui ne fait pas l’objet de ce type de mécanisme, soit considérée comme un versement volontaire.

Attention ! Lorsqu’elle est affectée à un plan d’épargne retraite d’entreprise (PERECO ou PERO), la PPV doit être versée dans le deuxième compartiment recevant les sommes issues de l’épargne salariale, au même titre que l’intéressement et la participation (Boss-Epargne sal.-320). Ce commentaire du Boss est conforme aux textes car la PPV est mentionnée au 2° de l’article L 224-2 du code monétaire et financier, qui liste les versements au titre de l’épargne salariale que peut recueillir un PER. Pour les PER, la PPV n’entre donc pas dans la catégorie des « versements volontaires » correspondant au 1° de cet article L.224-2, qui bénéficient d’une possibilité de déduction du revenu imposable. La nature de versement volontaire de la PPV mentionnée pour les PEE et Perco ne vaut donc pas pour les PERECO et PERO.

Versement de la prime

Lorsque l’entreprise qui verse la PPV est dotée d’un plan d’épargne salariale où la PPV peut être affectée, elle ne peut pas déléguer le paiement de la prime à son prestataire financier teneur de comptes en charge du PEE ou du PERE (BOSS-Epargne sal.-770).

Modalités déclaratives

Avant cette mise à jour opposable au 1er février 2025, le Boss indiquait que la PPV était incluse dans le revenu fiscal de référence (RFR) des bénéficiaires et qu’elle est prise en compte dans les bases ressources pour le calcul des prestations sociales.

Lorsque la PPV est affectée à un plan d’épargne salariale, elle est aussi incluse dans le RFR mais n’est pas prise en compte pour le calcul des prestations sociales (Boss-Epargne sal.-800).

► Pour rappel, la PPV est incluse dans le montant net social, sauf si elle est placée sur un plan (Boss-MNS-II, A-1).

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La rédaction sociale
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Les commentaires de l’administration sur la prime de partage de la valeur ont été déplacés vers une nouvelle rubrique consacrée à l’épargne salariale, et complétés quant aux modalités d’affectation de la prime à un plan d’épargne salariale ou retraite. Ce document est opposable aux Urssaf depuis le 1er février 2025.
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Le licenciement du salarié qui n’a pas reçu sa convocation à l’entretien préalable est irrégulier

Le licenciement du salarié qui n’a pas reçu sa convocation à l’entretien préalable est irrégulier

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L’employeur qui envisage de licencier un salarié doit le convoquer, avant toute décision, à un entretien qui ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée de convocation ou sa remise en main propre. Le point de départ de ce délai se situe le lendemain du jour de la remise de la convocation en main propre ou de la première présentation de la lettre au domicile du salarié (arrêt du 20 février 2008 ; arrêt du 10 juillet 2019).

A noter : le non-respect du délai de cinq jours, qui a pour but de laisser au salarié le temps de préparer sa défense et de rechercher une assistance, est une irrégularité de procédure (arrêt du 28 juin 2005), même si l’intéressé a réussi à se faire assister lors de l’entretien préalable (arrêt du 7 octobre 1998 ; arrêt du 6 octobre 2010). 

Dans un arrêt du 11 décembre 2024, la Cour de cassation se prononce, pour la première fois à notre connaissance, sur la question de la régularité de la procédure de licenciement d’un salarié auquel l’employeur a adressé une convocation à un entretien préalable par lettre recommandée avec avis de réception mais qui n’en a jamais été destinataire du fait d’une erreur de La Poste.

La non-présentation à un salarié de la lettre recommandée de convocation à l’entretien préalable…

En l’espèce, une salariée à laquelle est adressée une lettre recommandée de convocation à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement ne la reçoit jamais puisqu’elle est absente de son domicile au moment de sa présentation et qu’aucun avis de passage ne lui est délivré afin de lui indiquer qu’elle est à sa disposition au bureau de poste. Licenciée pour faute grave un mois après, elle saisit la juridiction prud’homale afin que son licenciement soit jugé nul et, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse. Dans ce cadre, elle sollicite également le paiement d’une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement. À l’appui de cette demande, elle fait valoir que, n’ayant jamais été destinataire de la lettre de convocation à l’entretien préalable, le délai de cinq jours ouvrables devant séparer ce courrier de l’entretien n’a pas été respecté par l’employeur.

La cour d’appel la déboute de sa demande. Pour elle, si l’avis de passage issu de la liasse du recommandé est manifestement demeuré attaché sur le courrier dans l’attente de sa distribution, une telle erreur n’est pas imputable à l’employeur. Ce dernier ne pouvait pas, par ailleurs, se convaincre de la défaillance de La Poste, n’ayant récupéré son pli que postérieurement à l’entretien préalable avec la mention « pli avisé et non réclamé » sur son recto. Dès lors, l’employeur avait rempli les obligations posées par l’article L 1232-2 du Code du travail en adressant la convocation dans les délais et les formes impartis et à l’adresse exacte de la salariée, et aucune irrégularité ne pouvait lui être opposée.

… rend la procédure de licenciement irrégulière

La Cour de cassation ne partage pas cette analyse et censure la décision des juges du fond. Pour elle, ils ne pouvaient pas juger la procédure de licenciement régulière et débouter la salariée de sa demande en paiement de dommages-intérêts alors qu’ils avaient constaté que la lettre recommandée de convocation à l’entretien préalable n’avait pas été présentée à la salariée, et ce, même si ce défaut de présentation résultait d’une erreur de La Poste.

A noter : cette solution peut paraître sévère pour l’employeur, qui n’a commis aucune erreur dans la procédure de convocation de la salariée à l’entretien préalable et qui ne pouvait pas se douter de celle de La Poste puisque la lettre de convocation qu’il avait adressée à la salariée lui était revenue avec la mention « pli avisé et non réclamé ». Toutefois, elle s’explique par le fait que la salariée n’a pas pu bénéficier du délai de cinq jours ouvrables prévu par l’article L 1232-2 du Code du travail pour préparer sa défense et rechercher une assistance dans la mesure où elle n’a jamais eu connaissance qu’une lettre avait été présentée à son domicile et au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation relative à la sanction du non-respect de ce délai exposée ci-dessus. La solution aurait été différente si la salariée, avisée du passage de La Poste, n’avait pas été retirer sa lettre de convocation auprès d’elle. La Cour de cassation considère en effet, dans ce cas, que le délai de cinq jours ouvrables commence à courir à compter du lendemain de la première présentation de la lettre de convocation au domicile du salarié, peu important la date de son retrait (arrêt du 6 septembre 2023).

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Valérie Dubois
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La procédure de licenciement d’un salarié est irrégulière si la lettre recommandée de convocation à son entretien préalable ne lui a pas été présentée, peu important que cette absence de présentation résulte d’une erreur de La Poste.
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Contrôle Urssaf : nullité du redressement calculé de façon illicite, même en accord avec le cotisant

Contrôle Urssaf : nullité du redressement calculé de façon illicite, même en accord avec le cotisant

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Le redressement doit en principe être établi sur des bases réelles…

Lorsque les opérations de contrôle conduisent l’inspecteur du recouvrement de l’Urssaf à constater des anomalies dans la détermination des bases de cotisations et contributions sociales, il est habilité à procéder au redressement de celles-ci. L’agent de contrôle doit normalement se fonder à cette fin sur l’ensemble des éléments comptables produits par le redevable. L’article R 243-59, II du CSS fait ainsi obligation au cotisant de mettre à disposition de l’agent tout document et de permettre l’accès à tout support d’information nécessaires aux opérations de contrôle.

La règle est impérative et conduit, à défaut, à la nullité du redressement et des actes qui s’en suivent, notamment de la mise en demeure et, le cas échéant, de la contrainte (Cass. 2e civ. 29-7-2009 n° 08-17.788 ; Cass. 2e civ. 13-10-2022 n° 21-11.754).

… sauf redressement par échantillonnage et extrapolation ou taxation forfaitaire

Le principe souffre toutefois certaines exceptions. L’agent peut ainsi recourir au contrôle et au redressement par échantillonnage et extrapolation dans les conditions strictement définies par les dispositions de l’article R 243-59-2 du CSS. Il peut également user de la taxation forfaitaire lorsque la comptabilité du cotisant ne permet pas, en raison de ses lacunes ou de son insincérité, a fortiori de son inexistence, d’établir le chiffre exact des éléments de rémunération servant de base aux cotisations et contributions, ou lorsque le cotisant ne met pas à la disposition de l’agent les documents et justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle ou que leur présentation ne permet pas leur exploitation (CSS art. R 243-59-4, I).

Le recours à la taxation forfaitaire est exceptionnel : le redressement est frappé de nullité dès lors que les éléments dont dispose l’agent de l’Urssaf permettent de procéder à la reconstitution des bases de cotisations et contributions (sur la question, voir Cass. soc. 9-11-1978 n° 77-13.723 ; Cass. soc. 23-2-1995 n° 92-18.385 ; Cass. 2e civ. 9-11-2017 n° 16-22.572).

…qui sont les deux seules exceptions admises

En l’espèce, l’Urssaf et l’employeur s’étaient accordés sur une méthode d’évaluation pour le calcul des sommes dues au titre de certains des chefs de redressement rendu délicat par la coexistence au sein de l’entreprise de salariés permanents et de travailleurs intérimaires. L’employeur n’en avait pas moins contesté à l’appui de son recours contentieux la détermination des bases du redressement sur le fondement de la convention ainsi conclue.

Pour les juges du fond, une telle méthode ne pouvait être retenue, l’Urssaf étant tenue de procéder au chiffrage exact des sommes réclamées sans pouvoir recourir à une méthode contrevenant aux règles d’ordre public énoncées par le CSS.

La solution est confirmée par la Cour de cassation (pourvoi n° 22-13.480), qui, après avoir rappelé les règles qui président au redressement des bases de cotisations et contributions sociales, dont elle précise qu’elles doivent faire l’objet d’une « application stricte », énonce, on ne peut plus clairement, que l’Urssaf ne peut, sauf à encourir la nullité des opérations de contrôle et de redressement, recourir, « même d’un commun accord avec le cotisant », à une méthode d’évaluation autre que le chiffrage direct des sommes dues dès lors qu’elle a à sa disposition les éléments de la comptabilité qui lui permettent d’établir le redressement sur des bases réelles.

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La rédaction sociale
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L’agent de contrôle de l’Urssaf ne peut pas recourir à une méthode de calcul illicite du redressement, même avec l’accord du cotisant, à peine de nullité du chef de redressement calculé de manière irrégulière.
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Modification de contrat pour externaliser : si refus, le licenciement doit avoir une cause économique

Modification de contrat pour externaliser : si refus, le licenciement doit avoir une cause économique

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Dans cette affaire, dans le cadre d’une réorganisation liée à un projet d’externalisation de certaines activités impliquant la suppression du poste du salarié concerné, engagé en qualité d’ingénieur support technique, ce dernier a été licencié après avoir refusé une proposition de poste d’ingénieur avant-vente, s’analysant en une proposition de modification de son contrat de travail, l’employeur soutenant avoir activement recherché son reclassement.

La cour d’appel de Versailles ayant débouté le salarié de ses demandes tendant à voir juger notamment ce licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse (CA Versailles 29-9-2009 n° 20/00656), ce dernier a formé un pourvoi (n° 22-23.468) contre cette décision devant la Cour de cassation, laquelle censure l’arrêt des juges du fond dans un arrêt du 22 janvier 2025 destiné à une large publication.

Le refus d’une modification du contrat de travail ne justifie pas à lui seul un licenciement

La chambre sociale rappelle, d’une part, que le seul refus par un salarié d’une modification de son contrat de travail ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement (jurisprudence constante, notamment Cass. soc. 7-7-1998 n° 96-40.256) et, d’autre part, que la rupture résultant du refus par le salarié d’une modification de son contrat de travail, proposée par l’employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique.

Elle poursuit en indiquant qu’il résulte des constatations de la cour d’appel que le motif de la modification du contrat de travail refusée par le salarié résidait dans la volonté de l’employeur d’externaliser ses activités commerciales dont l’intéressé avait la charge. L’employeur se bornait à soutenir que le refus des postes qui avaient été proposés caractérisait « une situation intolérable et inacceptable ».

L’employeur doit justifier d’une cause économique réelle et sérieuse

L’employeur n’ayant allégué, ni dans la lettre de licenciement, ni dans ses conclusions, que cette réorganisation, à l’origine de la proposition de modification de contrat, résultait de difficultés économiques ou de mutations technologiques ou qu’elle était indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise (conformément à l’article L 1233-3 du Code du travail), il en résulte que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

Cette solution va dans le sens de solutions précédentes rendues à propos du licenciement de salariés ayant refusé une modification de contrat de travail, quand la proposition de modification ne repose pas sur un motif personnel sans pour autant que l’employeur justifie d’un motif économique valable. Il en est ainsi lorsque la modification est motivée par la volonté de l’employeur de réorganiser un service de l’entreprise (Cass. soc. 11-7-2018 n° 17-12.747), de modifier le taux de rémunération variable de certains salariés pour garantir une égalité de rémunération avec d’autres salariés (Cass. soc. 28-5-2019 n° 17-17.929) ou de modifier l’organisation du travail après un contrôle de l’inspection du travail (Cass. soc. 19-6-2019 n° 18-11.824).

A noter : Bien que rendue dans le cadre juridique antérieur à l’entrée en vigueur de la loi Travail du 8 août 2016, cette décision nous paraît transposable au cadre juridique actuel. En effet, la loi Travail a simplement complété la liste des causes possibles de licenciement économique figurant à l’article L 1233-3 du Code du travail, en ajoutant aux difficultés économiques et aux mutations technologiques deux autres causes consacrées par la jurisprudence, à savoir la réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité et la cessation d’activité.

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La rédaction sociale
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Le refus par le salarié de la modification de son contrat de travail proposée par l’employeur en raison d’une externalisation de ses activités ne constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement que si cette réorganisation résulte de difficultés économiques ou de mutations technologiques, ou est indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise.
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Quel droit au versement d’une prime d’objectifs en cas d’arrêt prolongé pour maladie ?

Quel droit au versement d’une prime d’objectifs en cas d’arrêt prolongé pour maladie ?

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L’arrêt de travail pour maladie ou accident, professionnel ou non, suspend le contrat de travail. En principe, l’inexécution de son travail par le salarié dispense l’employeur de son obligation de lui verser une rémunération (C. trav. art. L 1226-1), sauf dispositions légales ou conventionnelles prévoyant le maintien de salaire, comme en cas de maladie. Mais quelle est l’incidence de l’absence sur le versement d’une prime ? Le salarié peut-il en demander le paiement ?

Il convient en la matière de s’en remettre aux dispositions fixant les conditions d’attribution de la gratification (convention ou accord collectif de travail, contrat de travail, etc.) et, le cas échéant, aux usages en vigueur dans l’entreprise. Le versement d’une prime peut ainsi être subordonné à la présence ou à l’activité effective du salarié dans l’entreprise au cours de l’exercice. Dans ce cas, son absence peut entraîner une baisse du montant attribué (versement au prorata du temps de présence) voire une suppression de la prime pour la période de suspension du contrat de travail.

Une salariée en arrêt prolongé pour maladie, licenciée pour inaptitude non professionnelle

En l’espèce, une salariée a été victime d’un accident du travail le 13 septembre 2017. Placée en arrêt maladie en janvier 2018, puis déclarée inapte à son poste de travail le 16 décembre 2019, elle a été licenciée pour inaptitude non professionnelle et impossibilité de reclassement le 13 février 2020. Elle a alors saisi la justice pour réclamer notamment un rappel de primes d’objectifs sur les années 2017 à 2020 pendant lesquelles elle était absente.

Les juges d’appel font droit à sa demande. Pour condamner l’employeur au paiement de la prime, ils retiennent que si celle-ci n’était pas prévue au contrat de travail, elle était versée semestriellement en fonction d’objectifs fixés par l’entreprise. Aussi, dès lors qu’il n’existait aucune indication quant à la suspension de la prime d’objectifs en cas d’absence, et que la salariée ne s’était pas vu fixer ses objectifs en début d’exercice, elle pouvait prétendre au montant maximal de la prime perçue précédemment. Les juges appliquent ici la règle d’octroi de la prime d’objectifs entière lorsque l’employeur n’a pas fixé ses objectifs au salarié alors qu’il le devait.

La société se pourvoit en cassation. Elle fait valoir que durant un arrêt maladie, le salarié peut uniquement percevoir les gratifications qui ne dépendent pas de sa prestation de travail. Par conséquent, l’employeur ne peut pas être condamné au paiement d’une rémunération variable dépendant de l’atteinte d’objectifs, pour n’avoir pas fixé ces objectifs au salarié, dès lors qu’en tout état de cause, cette rémunération variable n’était pas due.

Pas de versement de la prime d’objectifs en l’absence de clause de maintien de salaire

La chambre sociale de la Cour de cassation (pourvoi n° 23-19.352) retient les arguments de l’employeur et censure la décision de la cour d’appel au visa des articles L 1226-1 du Code du travail et 1103 du Code civil. Elle rappelle ainsi que la suspension du contrat de travail dispense l’employeur de son obligation de rémunération du salarié et que, sauf clause contractuelle ou conventionnelle contraire, un salarié ne peut prétendre recevoir une prime, lorsqu’elle a été instituée pour rémunérer une activité ou récompenser les services rendus, que dans la mesure du travail effectivement accompli (en ce sens : Cass. soc. 18-12-1984 n° 82-41.559). Les juges ne pouvaient donc pas condamner l’employeur à payer une somme à la salariée au titre de prime d’objectifs alors qu’ils avaient constaté qu’elle dépendait de la réalisation d’objectifs et que la salariée, dont le contrat de travail avait été suspendu pour maladie pendant plus de 3 ans, ne se prévalait d’aucune clause de maintien de salaire.

A noter : La position de la chambre sociale se justifie en l’espèce par l’absence d’obligation de maintien de salaire par l’employeur. En cas d’arrêt maladie pendant la période de référence de calcul d’une prime d’objectifs, le salarié ne peut prétendre à son paiement que s’il a droit au maintien de son salaire. La solution pourrait être différente si, par exemple, les absences pour maladie du salarié sont consécutives à un harcèlement moral de l’employeur. Dans une telle hypothèse, les juges considèrent que l’intégralité de la prime peut être accordée (Cass. soc. 23-9-2009 n° 08-44.061).

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La rédaction sociale
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Selon la Cour de cassation, une prime liée à la réalisation d’objectifs n’est pas due en cas d’arrêt prolongé pour maladie en l’absence d’obligation de maintien de salaire par l’employeur.
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La Cour des comptes épingle l’Index égalité professionnelle

A la une (brève)

La Cour des comptes a publié avant-hier un rapport sur « les inégalités entre les femmes et les hommes, de l’école au marché du travail ».

Dans ce rapport, la Cour des comptes juge sévèrement l’Index égalité professionnelle. Elle y voit « un index de façade dont la logique de résultats n’est pas probante ».

Si « en 2023, la note moyenne à l’index est de 88 points sur 100, soit + 2 % par rapport à 2022″, ce bilan globalement positif mérite néanmoins d’être nuancé à plusieurs titres », indique la Cour des comptes : 

  • 7,6 % des entreprises ont une note globale encore inférieure à 75 points ;
  • l’Index ne touche qu’une faible part des salariés du privé du fait de ses règles d’assujettissement et de sa méthode de calcul ;
  • les entreprises entre 50 et 250 salariés ne sont pas soumises au critère d’écart dans les promotions ;
  • l’Index tend à invisibiliser les inégalités réelles entre femmes et hommes : ainsi, dans le calcul de l’indicateur 1, un seuil dit « de pertinence » d’une valeur de 5 % s’applique automatiquement pour calculer le pourcentage d’écart salarial global. 
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Florence Mehrez
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Vers une contractualisation des primes versées par erreur durant plusieurs années ?

Vers une contractualisation des primes versées par erreur durant plusieurs années ?

A la une

Les primes peuvent être prévues par une convention ou un accord collectif de branche ou d’entreprise, le contrat de travail, un usage ou un engagement unilatéral (primes dites obligatoires). Certaines primes n’ont aucune source juridique ; elles dépendent du « bon vouloir » de l’employeur (primes dites bénévoles).

Si l’employeur peut décider librement de supprimer une prime bénévole ou d’en modifier les conditions d’attribution, il ne peut pas supprimer unilatéralement une prime obligatoire.

Mais l’employeur peut-il supprimer une prime conventionnelle versée par erreur ?

Des primes versées longtemps par erreur peuvent devenir un élément contractuel

Si en principe, l’erreur n’est pas créatrice de droit, parfois, la source du paiement d’une prime peut provenir d’une erreur de l’employeur, répétée pendant plusieurs années.

Dans un arrêt du 13 décembre 2023, la Cour de cassation a jugé que la contractualisation d’une prime peut résulter d’une erreur de l’employeur. En l’espèce, suite à un défaut de paramétrage de son logiciel de paie, l’employeur avait versé par erreur, pendant sept ans, des primes à un salarié.

Cette décision peut paraître étonnante dans la mesure où il est de jurisprudence constante que l’erreur, même répétée, n’est pas créatrice de droit (arrêt du 10 mai 1979) et que la correction d’une erreur n’est pas considérée comme constitutive d’une modification de la rémunération du salarié nécessitant son accord exprès (arrêt du 19 juin 2019). 

Dans un arrêt du 4 décembre 2024, la Cour confirme la position prise en 2023.

Dans cette affaire, une salariée avait perçu une prime d’ancienneté conventionnelle pendant plusieurs années (de 1994 à 2014). Mais son niveau de rémunération ne lui permettait pas de revendiquer le versement de cette allocation d’ancienneté. Il s’agissait donc d’une erreur de l’employeur qu’il finit par rectifier en 2015. La salariée saisit alors la justice pour obtenir le rétablissement de la prime et un rappel de paiement de cette prime à compter de 2015. Les juges du fond ne font pas droit à ses demandes.
Ils sont censurés par la Cour de cassation.

Pour cette dernière, l’allocation supplémentaire pour ancienneté était devenue, en raison de son paiement systématique par l’employeur pendant 20 ans, indépendamment de toute condition conventionnelle d’attribution, un élément de rémunération de la salariée.

Une erreur peut-elle devenir dorénavant créatrice de droits ?

Sur la base des décisions de 2023 et 2024, les juges peuvent donc conclure qu’une erreur devient un élément contractuel sur lequel l’employeur ne peut plus revenir, en tout cas lorsqu’il s’agit d’une erreur répétée durant plusieurs années.

La longévité de l’erreur semble, en effet, être une condition déterminante dans la position de la Cour de cassation. Ainsi, l’ancienneté de l’erreur pourrait dorénavant aboutir à la contractualisation de l’avantage indu.

En attendant une position de principe de la Cour de cassation, ces arrêts doivent inviter l’employeur à faire preuve d’une grande vigilance et à éviter, autant que faire ce peut, de commettre des erreurs sur la rémunération du salarié.

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Géraldine Anstett
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La Cour de cassation considère qu’une prime conventionnelle versée par erreur pendant une longue durée peut devenir un droit acquis pour le salarié. Cette jurisprudence innovante repose sur la répétition systématique des versements erronés et invite à une attention particulière dans la gestion des primes.
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