L’employeur peut licencier pour inaptitude et impossibilité de reclassement un salarié déclaré inapte s’il justifie du refus par celui-ci d’un emploi proposé dans les conditions prévues à l’article L.1226-2 (inaptitude non professionnelle) ou L.1226-10 (inaptitude professionnelle) du code du travail et conforme aux préconisations du médecin du travail. Dans ce cas, l’obligation de reclassement est réputée satisfaite en application de l’article L.1226-2-1 ou L.1226-12 du code du travail (arrêt du 13 mars 2024 ; arrêt du 26 janvier 2022) .
Toutefois la Cour de cassation a toujours précisé que cette présomption ne joue que si l’obligation de reclassement a été exécutée loyalement (arrêt du 26 janvier 2022). Mais sur qui pèse la charge de la preuve du caractère loyal de la proposition de reclassement ? La Cour de cassation vient de répondre clairement que cette preuve incombe au salarié.
En l’espèce, un salarié contestait son licenciement pour inaptitude pour non-respect de l’obligation de reclassement. L’employeur lui avait proposé neuf postes au sein du groupe, conformes aux préconisations du médecin du travail mais tous éloignés géographiquement du domicile du salarié, raison pour laquelle celui-ci les avait refusés.
La cour d’appel lui fait droit après avoir relevé qu’il existait de nombreux autres postes à pourvoir et que la société ne produisait pas le registre unique du personnel de ses établissements situés en région Normandie. Elle en avait déduit qu’’à défaut de rapporter la preuve qu’il n’existait pas en Normandie de postes disponibles compatibles avec les qualifications et les capacités physiques restantes du salarié, l’employeur n’avait pas respecté son obligation de reclassement dans des conditions suffisamment loyales et sérieuses.
La Cour de cassation n’est pas de cet avis. Elle considère que la cour d’appel a inversé la charge de la preuve en s’appuyant sur l’’article 1354 du code civil selon lequel « la présomption que la loi attache à certains actes ou à certains faits en les tenant pour certains dispense celui au profit duquel elle existe d’en rapporter la preuve ».
Il en résulte que lorsque l’employeur a proposé un emploi conforme, l’obligation de recherche de reclassement est réputée satisfaite et il appartient au salarié de démontrer que cette proposition n’a pas été faite loyalement.
A titre d’exemples, l’obligation de reclassement est déloyale lorsque :
- l’employeur propose certains postes préconisés par le médecin du travail mais pas celui qui avait été pourtant déjà occupé par le salarié, pour lequel il était demandeur et qui était disponible (arrêt du 26 janvier 2022) ;
- l’employeur ne propose pas le poste en télétravail préconisé par le médecin du travail même si le télétravail n’était pas mis en place dans l’entreprise (arrêt du 29 mars 2023).
► En conséquence, le salarié aura tout intérêt à échanger avec le médecin du travail, ainsi qu’avec le CSE, s’il existe, sur ses desiderata sur le poste de reclassement pour orienter les recherches de reclassement de l’employeur. Si un tel poste est disponible, répond aux compétences du salarié et qu’il a été préconisé par le médecin du travail, l’employeur devra le proposer en priorité pour exécuter loyalement son obligation de reclassement.
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