Selon le Code de la sécurité sociale, la déclaration sociale nominative (DSN) doit être adressée le mois suivant la période de travail au titre de laquelle les rémunérations sont dues, au plus tard, le 5 de ce mois pour les employeurs dont l’effectif est d’au moins 50 salariés et dont la paie est effectuée au cours du même mois que la période de travail ou le 15 de ce mois dans les autres cas. Pour les entreprises d’au moins 50 salariés pratiquant le décalage de paie, la DSN peut donc être envoyée le 15 du mois. La Cour de cassation était toutefois interrogée pour savoir si un tel décalage de la paie emportait automatiquement le décalage de l’envoi de la DSN ou s’il importait au contraire à l’employeur d’informer au préalable l’Urssaf.
Dans cet arrêt du 5 septembre 2024, l’Urssaf avait considéré qu’une société avait procédé à l’envoi tardif de sa déclaration sociale nominative pour les mois de février à juin 2017. L’organisme de recouvrement lui avait alors notifié des pénalités, puis une mise en demeure.
De son côté, la société contestait cette décision dans la mesure où, pratiquant le décalage de paie, elle s’estimait en fait dans les délais. Les juges du fond lui ont donné raison et ont annulé les pénalités. Ils ont condamné l’organisme de recouvrement au remboursement des sommes litigieuses.
L’Urssaf se pourvoit en cassation. Pour l’organisme de recouvrement, il existe une présomption de paiement des salaires au cours du même mois que la période de travail et il appartient à l’employeur de l’informer afin que soit décalée en temps utile la date d’exigibilité de la DSN au 15 du mois suivant et que ne soient pas appliquées des pénalités de retard.
Selon l’article R 243-12 du CSS, une pénalité égale à 1,5 % du montant du plafond mensuel des cotisations de sécurité sociale par travailleur salarié ou assimilé est appliquée, pour chaque mois ou fraction de mois de retard, à l’employeur en cas de défaut de production des déclarations aux échéances prescrites ou en cas d’omission de salariés ou assimilés sur celles-ci. L’obligation s’applique, plus particulièrement, à la déclaration sociale nominative prévue par l’article L 133-5-3 du CSS, laquelle doit être produite à l’appui du versement des cotisations. Les dispositions de l’article R 133-14 du CSS renvoient, en effet, sur ce point à l’article R 243-6 du même Code qui précisent que le versement des cotisations doit intervenir au cours du mois suivant la période de travail au titre de laquelle les rémunérations sont dues, le 5 de ce mois pour les employeurs dont l’effectif est d’au moins 50 salariés et dont la paie est effectuée le même mois que la période d’activité, et le 15 de ce mois dans les autres cas (CSS art. R 243-6, II dans sa version applicable au litige). Cette dernière formule s’applique non seulement aux employeurs dont l’effectif est inférieur à 50 salariés, mais également aux employeurs qui emploient au moins 50 salariés dans l’hypothèse où la rémunération afférente à un mois déterminé n’est pas versée au cours de ce même mois, mais le mois suivant.
Ce cadre posé, le décalage de la paie emportait-il le décalage de l’envoi de la déclaration sociale nominative ? La Cour de cassation répond à la question par l’affirmative tout en assortissant la faculté ainsi ouverte à l’employeur d’une condition bien précise : il importe que ce dernier ait informé au préalable l’organisme de recouvrement du décalage des opérations de versement de la rémunération aux salariés de l’entreprise. À défaut, l’employeur s’expose aux pénalités prévues en cas de retard ou d’omission dans les déclarations et productions auxquelles il est tenu.
A noter : La solution retenue confirme, si besoin était, l’importance accordée par le droit des cotisations sociales à l’exigibilité de ces dernières. Certes, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, complétée par celle pour 2024, a entendu modifier le fait générateur des cotisations. Alors que ce dernier procédait antérieurement du versement effectif de la rémunération au salarié, il est déterminé à présent, au terme d’une formule non dépourvue d’ambiguïté, par la période d’activité au titre de laquelle les revenus d’activité sont attribués (CSS art. L 242-1, I). Le régime juridique de la dette de cotisation n’en demeure pas moins tributaire, avant tout, du versement de la rémunération, lequel détermine, en particulier, l’exigibilité des cotisations. C’est dans cette perspective que s’inscrit la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, alors même qu’elle reprend sur la question du décalage de la paie et de ses effets sur les obligations déclaratives de l’employeur, la position prise en son temps par la chambre sociale (Cass. soc. 11-2-1981 no 79-12.869 P et 79-16.375 P : Bull. civ. V no 124 ; Cass. soc. 12-6-1981 no 79-13.043 P : Bull. civ. V no 549).
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