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Pour rappel, à l’occasion de toute rupture du contrat de travail l’employeur est tenu d’établir, en double exemplaire, un document dit « reçu pour solde de tout compte » récapitulant les sommes versées au salarié (montant des salaires, primes, indemnités diverses…) à ce titre. Le salarié a la possibilité de le dénoncer par lettre recommandée dans les 6 mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.

Si l’employeur a l’obligation de remettre un reçu pour solde de tout compte au salarié, ce dernier n’est pas tenu de le signer.
Dans le cas où le salarié ne signerait pas ou refuserait de signer le reçu pour solde de tout compte, cette absence de signature a-t-elle un impact sur la valeur de ce document ? Cela a-t-il une incidence sur le délai de prescription applicable à l’action en paiement des sommes mentionnées ? Plus précisément, le fait que le salarié n’ait pas signé son reçu pour solde de tout compte en raison de son incarcération empêche-t-il la prescription de courir ? Autant de questions auxquelles la Cour de cassation a répondu dans un arrêt du 14 novembre 2024.

Le contexte

L’affaire concernait un salarié licencié pour motif disciplinaire par lettre du 11 avril 2013 avec dispense de préavis de 2 mois. A l’issue de celui-ci, l’employeur avait établi son solde de tout compte en date du 13 juin 2013. 
Mais le salarié ne l’a jamais signé du fait de son incarcération du 25 juin 2013 jusqu’au 22 juin 2017. A sa sortie, il avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande en paiement de diverses sommes au titre de son solde de tout compte.
La cour d’appel avait déclaré sa demande recevable. La Cour de cassation lui donne tort et expose sa position dans un attendu de principe.

La signature du salarié : un élément essentiel du reçu pour solde de tout compte

La Haute Cour rappelle tout d’abord les termes des articles L.1234-20 relatif au reçu pour solde et L.1471-1 du code du travail qui concerne le délai de prescription applicable à l’action.

Le délai de prescription appliqué dans cette affaire est celui de l‘article L.1471-1 du code du travail dans sa version issue de la loi relative à la sécurisation de l’emploi. Ce texte avait prévu que ce délai (passé de cinq ans à deux ans) pour les actions portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail devait s’appliquer aux prescriptions en cours à compter de la promulgation de la loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Elle poursuit en indiquant que « le reçu pour solde de tout compte non signé par le salarié, qui n’a pas de valeur de preuve du paiement des sommes qui y sont mentionnées, n’a aucun effet sur le délai de prescription, lequel ne court pas ou n’est suspendu qu’en cas d’impossibilité d’agir à la suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure ».

Cette décision s’inscrit dans la continuité d’une jurisprudence antérieure sur les effets de l’absence de signature du reçu pour solde de tout compte. La Cour de cassation a déjà précisé que le reçu pour solde de tout compte non signé par le salarié ne fait pas preuve du paiement des sommes qui y sont mentionnées. Il appartient en conséquence à l’employeur de justifier de ce paiement (arrêt du 27 mars 2019). Implicitement, la Cour de cassation ne retient pas l’incarcération comme cause d’interruption ou de suspension du délai de prescription. 

Elle reproche à la cour d’appel d’avoir retenu, pour déclarer l’action recevable, que le solde de tout compte, que le salarié n’avait jamais signé en raison de son incarcération (du 25 juin 2013 au 22 juin 2017) n’avait produit aucun effet libératoire et qu’aucune prescription n’avait commencé à courir. Or, elle avait aussi constaté que la prescription s’était appliquée à compter du 16 juin 2013 et que le salarié avait eu jusqu’au 16 juin 2015 pour engager toute action portant sur l’exécution et la rupture de son contrat travail. Mais comme elle n’avait pas en l’espèce caractérisé une cause d’interruption ou suspension du délai de prescription, celui-ci était donc logiquement forclos. L’arrêt devait donc être cassé.
Conséquences pratiques : la signature du salarié apparaît un élément essentiel du reçu pour solde de tout compte. Son absence prive ce document de son effet libératoire au-delà du délai de six mois prévu par l’article L.1234-20 du code du travail. Comme le salarié n’a aucune obligation de le signer, l’employeur ne peut pas conditionner le paiement des sommes mentionnées dans ce document à la signature du salarié. 
De son côté le salarié reste libre tant qu’il n’a pas signé son reçu de tout compte de contester le contenu de celui-ci.
Toutefois, le salarié reste tenu, s’il veut contester les sommes mentionnées dans ce reçu pour solde de tout compte non signé, d’agir dans le délai de prescription puisque l’absence de signature du salarié ne produit pas d’effet sur le délai de prescription. Celui-ci continue de courir. Seule l’impossibilité d’agir à la suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure peut interrompre celui-ci. L’incarcération du salarié n’est pas un motif, en soi, permettant de suspendre le délai de prescription.

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Françoise ANDRIEU
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Le solde de tout compte non signé par un salarié ne peut pas constituer une preuve de paiement des sommes qui y sont mentionnées et n’a aucun effet sur le délai de prescription de l’action en paiement. Celui-ci n’est interrompu ou suspendu qu’en cas d’impossibilité d’agir à la suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure.
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