Issue de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 sur le pouvoir d’achat, la prime de partage de la valeur (PPV) a fait l’objet d’une instruction mise en ligne sur le site internet du Bulletin officiel de la sécurité sociale (Boss) le 10 octobre 2022, dans le bloc « Mesures exceptionnelles ». Mis à jour plusieurs fois depuis cette date, le contenu de cette instruction vient d’être transféré, le 24 janvier dernier, au sein d’une nouvelle rubrique du Boss intitulée « Epargne salariale », qui pour l’instant ne contient qu’un premier chapitre consacré à la PPV.
Ce transfert a nécessité une réécriture car le contenu, auparavant présenté sous la forme d’un « Questions-réponses », est désormais composé de paragraphes classiques au sein d’un plan. A cette occasion, quelques commentaires et exemples ont été introduits ou mis à jour.
Par ailleurs, de nouveaux paragraphes ont été ajoutés à propos de la possibilité d’affectation de la PPV à un plan d’épargne salariale, permise depuis le 1er juillet 2024 (loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023, article 9 ; décret n° 2024-644 du 29 juin 2024). Nous n’analyserons ci-après que ces ajouts.
► Le Boss indique que le contenu du chapitre PPV est opposable à l’administration depuis le 1er février 2025. L’instruction du 10 octobre 2022 est abrogée mais est toujours accessible dans le bloc « Mesures exceptionnelles » et reste opposable pour le régime social temporaire des PPV avant le 1er janvier 2024, qui n’a pas été repris dans le nouveau chapitre.
Les différents plans d’épargne auxquels peut être affectée la PPV sont le PEE, le Perco, le PERECO et le PERO. Ces plans peuvent être conclus au niveau de l’entreprise, de l’UES, du groupe, de la branche ou au niveau inter-entreprises (Boss-Epargne sal.-310).
► Pour rappel, en cas de placement sur un de ces plans, la PPV bénéficie d’une exonération d’impôt sur le revenu (loi n° 2022-1158, article 1er, VI ter).
Même si le code du travail ne le prévoit pas explicitement, le règlement du plan doit préciser clairement les différentes sources d’alimentation du plan d’épargne (Guide de l’épargne salariale, juillet 2014, dossier PEE, fiche 2).
En conséquence, les entreprises doivent modifier le règlement de leur plan d’épargne pour prévoir la possibilité d’y affecter les sommes versées au titre de la PPV. Par tolérance, le Boss admet que les sommes versées jusqu’au 30 juin 2025 au titre de la PPV puissent être affectées à un plan avant la modification de son règlement (Boss-Epargne sal.-330).
De même, le règlement du plan doit être modifié pour que la PPV puisse faire l’objet d’un abondement de l’employeur. Sur ce point, pas de tolérance : pour l’administration, il est indispensable que les règlements des plans mentionnent si les sommes versées au titre de la PPV peuvent être abondées et à quelle hauteur, et aucun abondement n’est possible sans une modification du règlement (Boss-Epargne sal.-340).
Attention, les modifications visant à ajouter de nouvelles possibilités d’investissement des sommes au sein d’un plan d’épargne inter-entreprises peuvent, en principe, d’une révision simplifiée du règlement. Le Boss précise que cette procédure de révision simplifiée n’est pas application à la modification permettant l’affectation de la PPV au plan (Boss-Epargne sal.-350).
L’information des salariés via une fiche distinction du bulletin de paie
Si l’entreprise dispose d’un plan d’épargne salariale ou retraite visé ci-avant, chaque somme versée au titre de la PPV fait l’objet d’une fiche distincte du bulletin de paie qui mentionne notamment le montant attribué et la possibilité de verser tout ou partie de la prime sur le plan, ainsi que le délai de demande qui est de 15 jours à partir de la réception de ladite fiche (loi n° 2022-1158, article 1er VI ter ; décret n° 2024-644 du 29 juin 2024, article 1er).
Le Boss rappelle cette obligation informative (Boss-Epargne sal.-790).
► Selon les textes, la fiche distincte du bulletin de paie est délivrée aux salariés dès lors que l’entreprise dispose d’un plan d’épargne salariale. La question de sa délivrance se pose lorsqu’un plan existe mais ne vise pas la PPV comme source éventuelle d’alimentation. En toute logique, l’obligation ne devrait pas s’appliquer car elle est sans objet. Les mentions de la fiche autres que celles relatives à la possibilité d’affectation au plan (à savoir le montant de la PPV et les retenues au titre de la CSG/CRDS) figurent sur le bulletin de paie.
Un bulletin d’option pour recueillir le choix du salarié
Le Boss indique, par ailleurs, que les salariés sont interrogés sur l’emploi des sommes issues de la PPV par l’intermédiaire d’un bulletin d’option et que les salariés disposent de 15 jours après la réception de ce bulletin d’option pour décider de percevoir directement la prime ou d’en investir tout ou partie sur le plan (Boss-Epargne sal.-360).
Attention ! Les textes légaux et réglementaires faisant courir ce délai à partir du jour de réception par le salarié de la fiche distincte du bulletin de paie, il semble plus que judicieux, pour éviter toute discordance des délais, d’adresser au salarié fiche d’information et bulletin d’option en même temps.
L’administration précise que le délai de 15 jours se décompte en jours calendaires : il commence à courir le lendemain de la réception du bulletin (et de la fiche) et expire le dernier jour à minuit. Si le jour d’expiration est un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, le délai est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant (Boss-Epargne sal.-360).
Comment informer et recueillir le choix du salarié si la prime est versée en plusieurs fois ?
Une PPV peut être versée en plusieurs fois, dans la limite d’un versement par trimestre au cours d’une année civile (loi n° 2022-1158, article 1er IV).
Dans cette situation, l’information des salariés sur l’investissement ou la disponibilité immédiate de la prime doit, en principe, être adressée au titre de chaque versement, indique le Boss.
Toutefois, il admet que l’employeur interroge les salariés seulement une fois, lors du premier versement, et qu’il considère la réponse du salarié valable pour ce versement et tous les suivants. Le salarié doit toutefois pouvoir revenir sur son choix initial, à chaque nouveau versement dans l’année civile. L’employeur doit l’informer de cette possibilité, lors de l’interrogation effectuée au moment du premier versement (Boss-Epargne sal.-390).
Attention ! Il ne faut pas confondre versement fractionné d’une PPV et versement de deux PPV au cours d’une même année civile. Dans le second cas de figure, la réponse donnée par le salarié lors du versement de la première PPV n’est pas valable lors du versement de la seconde.
Les salariés intérimaires peuvent percevoir une PPV versée par leur employeur (l’entreprise de travail temporaire – ETT) mais aussi par l’entreprise utilisatrice dans laquelle ils sont mis à disposition, s’ils remplissent la condition de présence. Dans les deux cas, c’est l’ETT qui se charge du versement de la prime au salarié (loi n° 2022-1158, article 1er II ; Boss-Epargne sal.-500 et 510).
Le Boss précise, aujourd’hui, qu’il est tenu compte de l’effectif de l’entreprise utilisatrice pour l’application du régime social et fiscal de la PPV versée aux intérimaires.
Exemple : si un intérimaire percevant une rémunération inférieure à 3 Smic annuels se voit attribuer, en 2024, une PPV d’une entreprise utilisatrice, sa PPV est exonérée d’impôt sur le revenu, de CSG/CRDS seulement si cette entreprise emploie moins de 50 salariés. Peu importe l’effectif de l’ETT.
Le Boss précise également que les salariés intérimaires ne peuvent affecter leur prime qu’aux plans d’épargne de l’ETT, s’il en existe, et non aux plans d’épargne des entreprises utilisatrices (Boss-Epargne sal.-540).
Cette précision, qui semble logique puisqu’un intérimaire, n’étant pas lié à l’entreprise utilisatrice par un contrat de travail, n’a pas accès ses plans d’épargnes, appelle toutefois à la vigilance. Elle suppose que le règlement du plan de l’ETT vise cette source d’alimentation et prévoie, éventuellement, son abondement.
► A priori, l’exonération d’impôt sur le revenu s’appliquerait bien à ce cas particulier d’affectation puisque le VI ter de l’article 1er de la loi n° 2022-1158 qui prévoit cette exonération, vise les primes versées dans les conditions prévues au II à IV, ce qui englobe le cas des intérimaires (traité au II).
Comme auparavant, le Boss admet que la prime puisse être versée de manière décalée par l’ETT par rapport à l’entreprise utilisatrice (Boss-Epargne sal.-510).
► Dans l’instruction abrogée, il était indiqué, pour les primes bénéficiant du régime d’exonération en principe applicable jusqu’au 31 décembre 2023, que le versement pouvait avoir lieu après cette date mais avant une date butoir fixée au 29 février 2024 (Boss-Prime de partage de la valeur-2.12 et 7.5). Cette tolérance n’a pas été reprise et aucune date butoir n’a été fixée pour le régime d’exonération prenant fin le 31 décembre 2026.
A défaut de réponse du salarié dans le délai imparti, la prime lui est versée directement ; elle n’est pas affectée par défaut sur un plan.
En outre, dès lors que la prime est affectée sur un plan d’épargne salariale, le salarié ne peut pas revenir sur son choix et se rétracter. La prime ne peut pas être sortie du plan pendant la période d’indisponibilité prévue par le plan, sauf cas de déblocage anticipé. Seuls les avoirs en compte dans le plan d’épargne salariale avant la survenance du fait générateur ouvrant droit au déblocage anticipé peuvent être débloqués (Boss-Epargne sal.-390).
Le Boss précise que la PPV a la nature d’un versement volontaire (Boss-Epargne sal.-390) et qu’elle est prise en compte dans l’appréciation du plafond annuel des versements volontaires du salarié sur un PEE ou un Perco, égal à 25 % de la rémunération brute annuelle (Boss-Epargne sal.-400).
Pour rappel, l’administration considère en revanche que ne sont pas prises en compte, pour l’appréciation de ce plafond, les primes de participation ou d’intéressement verses au plan. Initialement ces deux types de versements étaient considérés comme étant volontaires mais la doctrine administrative a changé lors de la mise en place, pour chacun d’entre eux, de mécanismes d’affectation par défaut à un plan. Il est logique que la PPV, qui ne fait pas l’objet de ce type de mécanisme, soit considérée comme un versement volontaire.
Attention ! Lorsqu’elle est affectée à un plan d’épargne retraite d’entreprise (PERECO ou PERO), la PPV doit être versée dans le deuxième compartiment recevant les sommes issues de l’épargne salariale, au même titre que l’intéressement et la participation (Boss-Epargne sal.-320). Ce commentaire du Boss est conforme aux textes car la PPV est mentionnée au 2° de l’article L 224-2 du code monétaire et financier, qui liste les versements au titre de l’épargne salariale que peut recueillir un PER. Pour les PER, la PPV n’entre donc pas dans la catégorie des « versements volontaires » correspondant au 1° de cet article L.224-2, qui bénéficient d’une possibilité de déduction du revenu imposable. La nature de versement volontaire de la PPV mentionnée pour les PEE et Perco ne vaut donc pas pour les PERECO et PERO.
Lorsque l’entreprise qui verse la PPV est dotée d’un plan d’épargne salariale où la PPV peut être affectée, elle ne peut pas déléguer le paiement de la prime à son prestataire financier teneur de comptes en charge du PEE ou du PERE (BOSS-Epargne sal.-770).
Avant cette mise à jour opposable au 1er février 2025, le Boss indiquait que la PPV était incluse dans le revenu fiscal de référence (RFR) des bénéficiaires et qu’elle est prise en compte dans les bases ressources pour le calcul des prestations sociales.
Lorsque la PPV est affectée à un plan d’épargne salariale, elle est aussi incluse dans le RFR mais n’est pas prise en compte pour le calcul des prestations sociales (Boss-Epargne sal.-800).
► Pour rappel, la PPV est incluse dans le montant net social, sauf si elle est placée sur un plan (Boss-MNS-II, A-1).
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