► Enjeu : le gouvernement Barnier prendra-t-il de nouvelles orientations sur l’assurance chômage ? Après plusieurs semaines d’hésitation, Gabriel Attal avait décidé de suspendre sa réforme de l’assurance chômage censée entrer en vigueur le 1er décembre 2024.
► Pistes envisageables : les organisations syndicales étant fermement opposées à ce projet, elles feront savoir au gouvernement leurs revendications, par exemple un abaissement de la condition d’affiliation côté CFDT et l’agrément de l’accord négocié au sein de l’Unédic en novembre 2023 pour Force Ouvrière. Pour l’instant, un décret a prorogé le régime antérieur au projet de réforme jusqu’au 31 octobre. Il pourrait être de nouveau suspendu le temps d’y voir plus clair et de rencontrer les partenaires sociaux.
Se posera également la question du régime de bonus-malus sur les cotisations chômage des employeurs utilisant des contrats courts. Le dispositif a lui aussi été reconduit jusqu’au 31 octobre mais le précédent gouvernement prévoyait de revoir les secteurs concernés après des rencontres avec les syndicats. Rappelons également qu’un pan de la réforme a consisté à supprimer les allocations chômage aux salariés abandonnant leur poste. Le gouvernement Attal avait également annoncé la suppression de l’allocation spécifique de solidarité (AS) pour les chômeurs en fin de droit avant de finalement y renoncer. Enfin, les inspections des finances et des affaires sociales ont rendu un rapport préconisant de réaliser 610 millions d’économies sur les crédits de soutien aux demandeurs d’emploi dès 2025.
► Débat parlementaire : à défaut d’ouverture, en septembre, d’une session extraordinaire, la nouvelle session ordinaire débutera le 1er octobre, journée choisie par la CGT, la FSU et Solidaires pour leur mobilisation.
► Enjeu : après la dernière réforme de 2023 qui a rencontré une forte opposition syndicale et populaire pendant six mois de mobilisation, le gouvernement devra trancher entre un statu quo et une réouverture explosive du dossier. Les organisations syndicales vont demander à Michel Barnier une abrogation de la réforme, à savoir principalement la suppression de l’âge légal de départ à 64 ans et de l’allongement de la durée de cotisation. Le nouveau Premier ministre a d’ailleurs précisé qu’il était prêt à « améliorer » le texte et souhaitait rencontrer les centrales syndicales à ce sujet.
► Pistes envisageables : Il est cependant peu probable qu’il tente de revenir sur les fondamentaux de la réforme à savoir l’âge légal de départ à 64 ans. Le sujet sera sans doute inflammable pour le gouvernement si différentes forces politiques décident d’unir leurs forces à l’Assemblée en ce sens.
► Débat parlementaire : ce sujet pourrait mettre le gouvernement en difficulté devant l’Assemblée nationale. Le 31 octobre, le Rassemblement national consacrera sa journée de niche parlementaire au réexamen de la réforme des retraites, une réforme que la gauche et le groupe Liot souhaitent aussi abroger.
► Enjeu : les salaires et le pouvoir d’achat figurent en haut des préoccupations des Français en raison de l’inflation. Il sera difficile pour le gouvernement de ne pas y répondre. Parmi les revendications de l’intersyndicale figure la question de l’augmentation des salaires grignotés par l’inflation. Alors que les primes Macron se font une place dans les sujets de négociation dans les entreprises, les syndicats sont déterminés à œuvrer en commun pour le pouvoir d’achat des salariés. Ils pousseront également en faveur d’une augmentation du Smic au-delà de la seule revalorisation automatique liée à l’inflation.
► Pistes envisageables : s’il y a peu de chances que le gouvernement Barnier n’accède aux vœux du nouveau Front Populaire et des syndicats en matière de salaires, le gouvernement Attal aurait laissé à Michel Barnier un projet de refonte des exonérations patronales de cotisations autour du Smic. Les dispositifs existants seraient fusionnés en un système unique et dégressif à hauteur de 3 Smic au lieu de 3,5. La mesure serait issue du rapport Bozio-Wasmer demandé en son temps par Élisabeth Borne. Enfin, pendant la campagne des élections législatives, Gabriel Attal avait évoqué des évolutions de la prime de pouvoir d’achat (« prime Macron »). Il proposait de porter son plafond à 10 000 euros annuels (au lieu de 6 000) et de pouvoir en mensualiser le versement. Reste à voir si Michel Barnier reprendra l’idée.
► Débat parlementaire : si le Nouveau Front populaire poussera en faveur de hausses de salaires et d’un Smic à 1 600 euros net par mois, le gouvernement sera peut-être attiré par les propositions de l’ex majorité et de la droite autour de primes défiscalisées.
► Enjeu : redresser les comptes au regard de la baisse de recettes fiscales, de l’augmentation du déficit (peut-être 5,6 % du PIB pour 2024) et de l’augmentation des dépenses d’arrêt maladie, tout en apportant un début de solution au problème de pouvoir d’achat et à la situation du secteur de la santé (hôpitaux, Ephad…).
► Pistes envisagées ou envisageables :
- des coupes budgétaires (Gabriel Attal a envoyé cet été des lettres plafonds aux ministères comprenant des coupes de crédits comme -11 % pour les crédits emploi et travail de 2024 au ministère du travail, et l’inspection générale des affaires sociales et l’inspection des finances préconisent de réaliser 610 millions d’euros d’économies sur les crédits de l’accompagnement à l’emploi dès 2025 et 1,8 milliards d’économie sur la période 2025-2027) ;
- une possible remise en cause de l’absence d’augmentation des impôts (Michel Barnier a dit ne pas s’interdire davantage de justice fiscale) afin de bénéficier de davantage de rentrées fiscales. Bruno Le Maire a suggéré deux mesures urgentes : la taxation des rachats d’action et une nouvelle contribution des énergéticiens. D’autres pistes pourraient être débattues : taxation des ménages les plus aisés, augmentation de l’impôt sur les sociétés…
- des changements en matière d’arrêts de travail afin d’en limiter la croissance ;
- une refonte des cotisations sociales afin de permettre une hausse du revenu net sur les feuilles de paie (voir ci-dessous), etc.
► Débat parlementaire : si la droite devrait insister sur la maîtrise et la réduction des déficits et sur la revalorisation du travail, la gauche devrait mettre en avant son programme : refonte de l’impôt sur le revenu, conditionnement des aides aux entreprises, hausse du Smic, conférence sociale sur les salaires…
► Enjeu : l’assurance maladie s’inquiète d’une très forte progression du nombre des arrêts maladie en 2024, dont le coût pourrait atteindre 16 milliards d’euros cette année. L’an dernier, le projet de budget de la sécurité sociale avait déjà limité la durée des arrêts de travail prescrits en téléconsultation.
► Pistes envisagées : renforcement des contrôles des arrêts de travail, imposition de jours de carence supplémentaire (autrement dit, un délai supplémentaire entre le jour de déclaration de l’arrêt et le début de son indemnisation). Le directeur de la Cnam plaide aussi, dans une interview aux Echos, en faveur d’un nouveau système d’indemnisation des arrêts de travail « plus soutenable financièrement mais aussi plus juste ». Dans l’immédiat, la Cnam va renforcer ses contrôles.
► Débat parlementaire : si un texte voit le jour sur ce sujet au sein du PLFSS, nul doute que le débat sera vif au parlement, certains députés pourraient relayer le constat des organisations syndicales, à savoir que l’intensification du travail et l’allongement de la vie active sont à l’origine de la hausse du nombre d’arrêts.
► Enjeu : la situation française reste préoccupante quant aux nombres d’accidents du travail, et notamment des accidents de travail mortels.
► Pistes envisagées : jusqu’à présent, les gouvernements Borne et Attal avaient annoncé une campagne de communication (réalisée en 2023) ainsi qu’un plan d’action afin de prévenir ces accidents à élaborer après une conférence sociale. A noter que les partenaires sociaux ont proposé, en juin 2024, de nouvelles règles de réparation des accidents de travail et maladies professionnelles, à la suite de la controverse sur l’article 39. En résumé, si aucun changement n’est à prévoir pour le préjudice professionnel, l’incapacité personnelle serait évaluée selon le barème du concours médical et une nouvelle indemnisation serait calculée selon le référentiel Mornet, utilisé par les juges civils dans le contentieux de la réparation du dommage corporel. Le législateur reprendra-t-il ces pistes dans le prochain PLFSS ?
► Débat parlementaire : là encore, le clivage droite-gauche pourrait se manifester. Si l’exécutif met en pratique le plan d’action promis par Gabriel Attal lors des législatives, la gauche pourrait relancer son idée de restaurer un CHSCT indépendant et d’inscrire les risques psychosociaux dans le tableau des maladies professionnelles reconnues.
► Enjeu : la précédente majorité relative et son gouvernement avaient relancé l’idée d’une nouvelle simplification des obligations des entreprises mais aussi, pour l’automne, d’un nouvel acte de la réforme du code du travail après les ordonnances de 2017. Un rapport parlementaire suggérait même un relèvement des seuils sociaux qui aurait eu de fortes conséquences sur les prérogatives des CSE. Le projet avait aussi repris la demande de la CPME d’un test PME avant toute législation concernant les petites entreprises, une disposition écartée par le Conseil d’Etat. Autre idée évoquée par l’ancien ministre de l’économie, dont le directeur de cabinet Jérôme Fournel dirige aujourd’hui le cabinet de Michel Barnier : réduire le délai dont dispose un salarié pour contester son licenciement. Enfin, Gabriel Attal avait évoqué l’idée de confier davantage de négociations au niveau de l’entreprise.
► Pistes envisagées : Michel Barnier reprendra-t-il ces idées ? Nul ne le sait. Mais dans sa première interview à TF1, le 6 septembre, il a évoqué « l’inflation normative » qui pénalise selon lui l’entreprise. La dissolution a en tout cas mis un coup d’arrêt à l’examen par l’Assemblée d’un projet de loi sur la simplification qui comprenait notamment la réduction de deux à un mois du délai d’information préalable des salariés en cas de vente de fonds de commerce.
► Débat parlementaire : le clivage gauche-droit est bien réel sur cette question. L’ancienne majorité et le Rassemblent national pourraient s’accorder sur des mesures de simplification pour les entreprises. A l’inverse, la gauche prône un élargissement du droit d’intervention des salariés dans l’entreprise et un rétablissement du CHSCT.
► Enjeu : juguler le déficit de France compétences, estimé à plus d’un milliard d’euros, en 2024.
► Pistes envisagées : dans le cadre de la revue des dépenses, transmis aux parlementaires, le 4 septembre, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale des finances IGF) identifient 1,5 milliard d’euros d’économies potentielles et 421 millions de recettes supplémentaires. Parmi les propositions chocs, la suppression de l’aide à l’apprentissage pour les niveaux 6 (licence) et 7 (master) ; la taxation des revenus des apprentis ; une réforme systémique des niveaux de prise en charge (NPEC) des contrats d’apprentissage ; une redynamisation de la contribution supplémentaire à l’apprentissage (pour les entreprises de plus de 250 salariés qui embauchent moins de 5% d’apprentis) ainsi qu’un meilleur ciblage du FNE-formation (Fonds National pour l’Emploi-Formation).
► Débat parlementaire : si aucun projet de loi ne semble se profiler en matière de formation professionnelle, des ajustements pourraient se fondre dans le PLF pour 2025. Les partis politique se sont peu exprimés sur cette question pendant la campagne des élections législatives, hormis Renaissance. Dans son programme, le Nouveau front populaire insistait, lui, davantage sur un droit « renforcé » et « non bradé à l’entreprise », c’est-à-dire sur une remise en cause probable du co-financement entreprise/salarié du compte personnel de formation.
► Enjeu : améliorer le taux d’emploi des seniors pour permettre aux plus âgés de quitter le marché du travail au moment de la liquidation de leur retraite à taux plein. Pour ce faire, les partenaires sociaux, Medef et U2P en tête, sont partants pour relancer les négociations sur les salariés expérimentés après l’échec des discussions sur le pacte de la vie au travail, en avril dernier. L’U2P souhaite également élargir la discussion à l’allègement du coût du travail. Reste toutefois deux inconnues : quel sera le sort réservé à cette négociation, si un compromis se dessine et quid des projets d’accords finalisés, en mai, sur le compte épargne-temps universel (Cetu) et les transitions professionnelles, sans l’aval du Medef et de la CPME ? L’U2P a mené seul ces discussions. Le gouvernement Attal avait prévu d’inscrire ces trois sujets dans une future loi travail qui devait être présentée à l’automne à l’Assemblée nationale. Le nouvel exécutif devra trancher.
► Pistes envisagées : Plusieurs axes de discussion pourraient être au menu des prochains échanges sur l’emploi des seniors, à savoir le vieillissement de la population active, la pénibilité, les fonds de péréquation en matière d’inaptitude notamment ou encore les carrières longues.
► Débat parlementaire : si le sujet semble assez consensuel, plusieurs partis politiques, notamment la gauche et le RN, pourraient profiter de cette porte ouverte pour relancer le débat sur l’abrogation de la réforme des retraites et réaffirmer leur opposition à l’allongement de la vie active.
Quant au Cetu, il ne figure pas au programme du Nouveau front populaire mais il pourrait être défendu par Renaissance.
► Enjeu : permettre davantage de souplesse dans l’organisation du temps de travail, de façon aussi à attirer les candidats vers les entreprises, via une politique incitative.
► Pistes envisagées : L’idée avait été avancée par Gabriel Attal, lors des législatives, d’une expérimentation dans le privé de la semaine de 4 jours de travail, pour permettre » aux salariés qui ne peuvent pas télétravailler de bénéficier eux aussi d’un jour de repos supplémentaire ». Le président de la commission des affaires sociales de l’Assemblée mène une mission sur le sujet.
► Débat parlementaire : si un tel projet était présenté, on peut s’attendre à des débats sur la facilitation de la vie quotidienne, côté positif, mais aussi, côté négatif, sur le risque d’intensification du travail liée à la suppression d’un jour de travail sans aménagement des objectifs ni recrutements.
► Enjeu : A l’issue de la conférence sociale du 16 octobre 2023, la Première ministre, Élisabeth Borne, avait annoncé son intention de construire un Index de l’égalité professionnelle « plus ambitieux, plus transparent, plus fiable » qui devait permettre d’anticiper la transposition de la directive européenne du 10 mai 2023. Laquelle prévoit l’obligation de communiquer des données sur l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes d’ici le 7 juin 2026.
► Pistes envisagées : la Première ministre avait donc donné 18 mois aux partenaires sociaux pour réviser ce dispositif. Parmi les axes de réforme, créer un nouvel indicateur sur la répartition femmes-hommes des 10 % des rémunérations les moins élevées ; retravailler l’indicateur sur le taux de promotion des salariés ; réviser la marge de tolérance de 5% admise pour calculer les écarts de rémunération entre les sexes ; renforcer les sanctions aux entreprises ou encore utiliser les pénalités pour abonder un fond de promotion de l’égalité
► Débat parlementaire : si le Nouveau Front populaire veut mettre l’égalité professionnelle en avant, il n’a pas mentionné dans son programme, un nouveau texte législatif, insistant pour que les lois existantes soient d’abord appliquées. Le RN s’érige lui aussi en défenseur des droits des femmes. Mais en mai 2023, selon Le Monde, les eurodéputés avaient choisi de s’abstenir ou avaient voté contre la directive européenne sur la transparence et l’égalité des rémunérations, arguant que ces nouvelles règles ajoutaient une charge supplémentaire pour les petits employeurs. Ce même argument avait été repris par François-Xavier Bellamy (Les Républicains, LR) qui s’y était également opposé.
► Enjeu : annoncé mi-janvier par le chef de l’Etat, le projet de congé parental, destiné aux deux parents, devait encourager plus de pères à prendre un congé et réduire l’impact sur la carrière professionnelle des mères. En 2021, seulement 0,8 % des pères avaient pris ce congé, contre 14 % des mères.
► Pistes envisagées : le projet propose un nouveau congé mieux rémunéré mais plus court, chaque parent percevrait 50 % du salaire plafonné à 1 900 euros par mois pour une période de trois mois. Ce nouveau dispositif coexisterait avec l’actuel congé parental offrant ainsi aux familles plus de flexibilité selon leurs besoins financiers et professionnels. Des concertations ont été lancées en mai dernier, avec les syndicats, les élus et les associations familiales sur la future réforme. Mais plusieurs questions restent à trancher : devra-t-il remplacer l’actuel congé parental ou être une alternative ?
► Débat parlementaire : Le dispositif pourrait trouver sa traduction juridique dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 (PLFSS). Si la gauche pourrait reprendre à son compte les critiques syndicales tant sur le montant de l’indemnisation que sur sa durée, le Rassemblement national et Les Républicains n’en font pas mention dans leur programme.
► Enjeu : le nouveau Premier ministre s’était prononcé en faveur d’une maîtrise des flux migratoires, voire d’un gel de ces flux. Voudra-t-il aller plus loin que la dernière loi sur l’immigration ? C’est ce qu’attend de lui le Rassemblement national, la droite réclamant également un texte législatif reprenant les dispositions de la dernière loi censurées par le Conseil constitutionnel.
► Pistes envisagées : une reprise des textes censurés par le Conseil constitutionnel pourrait être envisagée par l’exécutif, mais le débat promet d’être très tendu.
► Débat parlementaire : alors que la loi sur l’immigration avait grandement fragilisé la majorité relative dont disposait, avant la dissolution, Emmanuel Macron, les échanges pourraient être indécis en cas de nouveau projet législatif. Roland Lescure, l’ancien ministre de l’industrie, s’est déclaré, dans Libération, favorable à une immigration de travail et hostile à tout gel migratoire.
♦ Toujours sur les sujets sociaux, d’autres projets de loi et propositions de loi lancés ou évoqués avant la dissolution pourraient, ou non, resurgir comme :
- le projet d’un bulletin de salaire simplifié dans le cadre du projet de loi sur la simplification ;
- la proposition de loi visant à davantage recourir au testing pour prévenir les discriminations ;
- la proposition de loi visant à interdire les discriminations capillaires ;
- la proposition de loi visant à « reconnaître et protéger la santé menstruelle et gynécologique dans le monde du travail »;
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